La pénurie de camionneurs et les impacts sur la sécurité aux quais de chargement

Il est à peine l’aube dans un centre de distribution très actif. Les premiers camions commencent à arriver. Certains chauffeurs sont des professionnels aguerris qui connaissent bien les lieux; d’autres en sont à leur première semaine de travail, embauchés directement après leur formation ou à la dernière minute pour combler un manque urgent de main-d’œuvre. Sur le quai, l’équipe est déjà en action. Tout le monde est pressé : on veut charger ou décharger les remorques le plus vite possible pour respecter l’horaire. Malheureusement, ce scénario d’urgence survient chaque jour dans les entrepôts partout en Amérique du Nord, et il met bien des vies en danger.

Alors que l’industrie fait face à une pénurie de camionneurs de plus en plus critique, la pression sur les équipes de distribution s’accentue. Ce qui, autrefois, était une routine prévisible et bien rodée est maintenant fragmenté et accéléré, ce qui amène de nouveaux risques à l’un des points les plus dangereux de la chaîne d’approvisionnement : le quai de chargement.

Selon l’American Trucking Associations, les États-Unis comptaient un manque de 60 000 camionneurs en 2023. Cette pénurie pourrait atteindre 82 000 d’ici la fin de 2025, et possiblement 160 000 d’ici 2030 si la tendance se maintient[i]. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : il devient de plus en plus difficile d’attirer et de retenir des chauffeurs qualifiés, alors même que la demande pour le transport de marchandises demeure forte.

À cela s’ajoute un taux de roulement qui dépasse régulièrement 90 % dans le camionnage longue distance. Résultat : les quais accueillent continuellement de nouveaux chauffeurs temporaires ou de passage, souvent peu familiers avec l’équipement de sécurité, les méthodes de communication ou les procédures propres au site[ii]. Ce manque de constance augmente les risques de malentendus, de départs prématurés et d’erreurs critiques pouvant mener à des accidents graves.

Les dangers cachés aux quais de chargement

1. Méconnaissance des procédures du site

Quand les chauffeurs changent constamment, certaines étapes de sécurité obligatoires peuvent être oubliées : installer les dispositifs d’immobilisation des roues, comprendre les signaux lumineux au quai, ou suivre les codes de communication internes.

C’est dans ces moments qu’on frôle l’accident… ou pire. Un des scénarios les plus fréquents : le départ hâtif. Un chauffeur, pressé ou mal informé, repart avant la fin du chargement. Les équipes de quai connaissent bien ce risque et savent qu’il est totalement évitable grâce à des procédures claires et une bonne sensibilisation.

2. La pression d’accélérer la cadence

Les échéanciers serrés poussent parfois les équipes à sauter des étapes ou à précipiter certaines opérations. Une étude de Travelers révèle qu’environ 30 % des accidents de remorque surviennent lors des manœuvres de mise à quai, de recul ou de déplacement dans la cour[iii]. Même si le camion n’est pas sur la route, le risque au quai demeure très élevé lorsque la vitesse prend le pas sur la sécurité.

3. Les retards et la fatigue

À l’opposé, certains camions attendent des heures avant d’être servis. Selon MH&L, les chauffeurs passent entre 117 et 209 heures par année immobilisés aux quais, souvent sans rémunération.

Cette attente provoque de la fatigue, de la frustration et augmente le risque d’erreurs. Et quand vient enfin le moment de repartir, le chauffeur peut être moins attentif, autant sur la route qu’au quai.

4. Les erreurs liées à la fatigue

La fatigue est un danger silencieux. Elle ne se manifeste pas seulement au volant, mais aussi lors des manœuvres : stationner, enclencher les freins, attendre le signal du quai… Selon le NIOSH, la fatigue est un facteur dans 12 % des incidents de camionnage, et les chauffeurs de camion ont cinq fois plus de risques de mourir au travail que la moyenne des autres travailleurs[iv]. Négliger cet enjeu met en péril à la fois les personnes et les opérations et aucun gestionnaire d’entrepôt ne veut porter ce poids sur sa conscience.

Au-delà de la conformité

Respecter la réglementation, c’est le minimum. Pour réellement protéger le personnel et assurer la sécurité des opérations, il faut adopter une approche proactive et intégrée, où la sécurité est ancrée dans chaque étape des activités au quai.

Tout commence par une communication claire et constante. Chaque chauffeur, qu’il soit un partenaire de longue date ou un sous-traitant qui arrive pour la première fois, doit être informé des procédures propres au site. Des affiches visibles, des signaux visuels intuitifs et du matériel multilingue contribuent à éliminer toute confusion.

Mais la communication seule ne suffit pas. Investir dans des équipements de sécurité fiables, comme des systèmes d’immobilisation de véhicules combinés à des alertes visuelles et sonores, aide à réduire les risques d’erreurs humaines, surtout lorsque la pression est forte. Ces outils ajoutent un filet de sécurité dans un environnement où la marge d’erreur est mince.

La culture organisationnelle joue aussi un rôle clé. Une mentalité axée sur la sécurité doit être appliquée à tous les niveaux. Cela implique de créer un climat où les employés se sentent à l’aise de signaler les quasi-accidents, et où la direction appuie activement les comités de santé et de sécurité, particulièrement lors des périodes de pointe ou de fort roulement de personnel.

La collaboration avec les transporteurs est tout aussi importante. Quand vos partenaires connaissent vos attentes en matière de sécurité et comprennent vos procédures avant même que les chauffeurs se présentent, le risque d’erreurs diminue, et les opérations se déroulent plus fluidement.

Enfin, une bonne planification des rendez-vous au quai permet de réduire la congestion. Moins d’attente signifie moins de fatigue pour les chauffeurs et moins de chaos pour les équipes, créant ainsi un environnement plus calme et plus sécuritaire.

Un effort collectif

La pénurie de camionneurs n’est pas qu’un casse-tête logistique : c’est un réel problème pour la sécurité aux quais. Y faire face demande plus que des solutions rapides : il faut du leadership, de la vigilance et une réelle collaboration entre les équipes d’entrepôt, les transporteurs et les chauffeurs.

Comme le rappelle Landline Media, les mauvaises conditions de travail et la stagnation des salaires sont des facteurs majeurs de la pénurie dans l’industrie du camionnage. Pour retenir des chauffeurs qualifiés et les garder motivés, les entreprises doivent investir non seulement dans l’équipement de sécurité, mais aussi dans le bien-être général des personnes derrière le volant. Quand les chauffeurs se sentent en sécurité, respectés et soutenus, ils sont beaucoup plus enclins à rester dans l’industrie, et cette stabilité profite à toute la chaîne d’approvisionnement.

Avec la haute saison qui approche, c’est le moment idéal pour examiner de près vos opérations au quai. Normaliser vos procédures, investir dans les bonnes technologies de sécurité et renforcer vos partenariats avec les transporteurs devraient être en haut de la liste.

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*Article traduit du texte Under Pressure: The Driver Shortage & Its impact on Loading Dock Safety.
Cet article a été publié à l’origine en anglais sur le site de MHI.

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[i] The Truck Driver Shortage: Statistics & Trends. https://altline.sobanco.com/truck-driver-shortage
[ii] Truck Driver Retention Problem Caused By Low Pay Working Conditions https://landline.media/ooida-truck-driver-retention-problem-caused-by-low-pay-working-conditions/
[iii] Prevent Trailer Damage to Loading Docks with Dock Bumpers. https://materialhandlingsafety.org/prevent-trailer-damage-to-loading-docks-with-dock-bumpers/
[iv] Truck Driver Detention: A Big Problem. https://www.mhlnews.com/transportation-distribution/article/55140053/truck-driver-detention-a-big-problem